La Gazette du 13ème – Journal de quartier

La Gazou

GAZETTE 89 – Les Filles du Roy

Posted by lagazou sur 25 octobre 2013


 

                                     Les “mères” “bâtisseuses “ de la nation québécoise.

 

En ce quatrième centenaire de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs a voulu célébrer, ce 6 juin 2013, le 350e anniversaire du départ, dans la décennie 1663-1673, de ces Filles depuis la mère patrie vers la Nouvelle-France, comme on appelait alors le Québec. Pour votre information deux “Gazetteuses”, Brigitte et Georgette, se sont donc retrouvées ce matin-là dans la grandiose chapelle de Libéral Bruant, architecte de Louis XIV, où le public pouvait assister à une Table ronde et des conférences ouvertes à tous.  Solennellement tout a débuté par le défilé silencieux d’une vingtaine de femmes en costumes d’époque : coiffes blanches ajustées, casaquins de couleurs vives, blouses blanches ouvertes sur de belles poitrines, longues jupes à plis en laine, fichus blancs triangulaires, sabots aux pieds, ce sont les descendantes des “Filles”. Ces costumes elles les ont confectionnés elles-mêmes , comme le faisaient leurs ancêtres.

Qui étaient-elles donc ces “Filles du Roy” ?  Levons tout de suite l’équivoque : ce n’étaient pas des filles publiques, ou prostituées pour parler crûment. Si en grande majorité elles viennent de la Salpêtrière c’est parce qu’en 1612 un édit de Marie de Médicis ouvre à cet emplacement un lieu où entretenir et nourrir 30.00 pauvres,   nombre qui ira croissant ; ‘et en 1661 Louis XIV fonde là “L’Hôpital général de la Ville de Paris” qui ne sera pas dédié aux soins, mais à l’enfermement des pauvres, des infirmes,des enfants qui traînent dans les rues, parmi eux beaucoup d’orphelines.  Là intervient la décision politique du Roi-Soleil : il veut transformer en colonie royale de peuplement les comptoirs ouverts, depuis la découverte par Montcalm, à des commerçants qui troquaient avec les amérindiens des fourrures contre de la pacotille. Ces hommes d’affaires ne voulaient pas que des familles s’installent, c’était un frein à leur commerce Le Roi décide de doter les orphelines : 50 livres, voire 100 livres pour les “Demoiselles”, issues de la noblesse désargentée ; s’y ajoutent des filles d’artisans ayant subi des revers de fortune. Donc ces femmes sont d’origines sociales mêlées. Aidé de Colbert, le Roi demande de sélectionner des candidates qui n’aient “rien de rebutant à l’extérieur, saines et fortes” à qui il offre une vie nouvelle dans un monde qu’elles espèrent plus ouvert que la France où sévissent alors des famines, et où leur avenir est bouché.

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Qui aidait à recruter ces femmes ?

Les ordres religieux ou congrégations séculières sous contrôle des évêques, qui ,seuls à cette époque, s’occupaient de l’éducation des filles, et des sociétés, comme la célèbre “Compagnie du Saint Sacrement”. De grandes dames, telles à Paris la duchesse d’Aiguillon, poussée par M. Vincent, qui deviendra St. Vincent de Paul, ont pour but essentiel d’apprendre aux postulantes à lire, à écrire, à broder , à respecter Dieu pour fonder des familles chrétiennes ; plus que d’instruction, il s’agit d’éducation. Entre le Jardin des plantes et la Seine sont créées des Maisons d’accueil des filles. A Rouen, à La Rochelle ,mêmes créations. A Rouen l’évêque demande à ses prêtres de parler de ces départs vers le nouveau monde dans leurs homélies Depuis la Réforme, la notion de travail devient primordiale. Les “Bons pauvres” recueillis par ces institutions de charité ont une obligation de travail, souvent très dur,d’après le témoignage d’une Fille revenue en France pour toucher un héritage et soulagée d’avoir pu partir de La Salpêtrière où elle se sentait comme en prison sans pouvoir jamais sortir. Par ailleurs le Roi fait partir sur les mêmes bateaux des “Engagés”, soldats qui signent pour rester 3 ans au Québec avec des avantages substantiels.

Quel fut leur voyage et leur vie à l’arrivée  ?

Nous sommes renseignées là-dessus par le livre de Marguerite Bourgeois, une des premières femmes qui a eu le courage de faire dès le milieu du XVIIe siècle de nombreuses traversées. Les bateaux étaient inconfortables. Les passagers voyageaient mêlés aux animaux, embarqués pour servir de nourriture. Le pain du départ était mangé de vers , et l’eau croupie au bout de près de 2 mois de traversée. Beaucoup moururent de fatigue, du typhus, et leurs corps étaient jetés à la mer. Certes, à l’arrivée les hommes se pressaient pour les accueillir et certaines rencontres furent heureuses, l’amour naissant au fil du temps. Ces filles saines et courageuses durent aider leurs maris à construire de nouvelles maisons, elle subirent parfois les attaques des Iroquois. Leur endurance et leur robustesse en firent des mères prolifiques : une moyenne de 8 enfants par femmes, certaines allant jusqu’à 14 en un seul mariage. Beaucoup se marièrent plusieurs fois, souvent avec des huguenots qui devaient cacher leur religion. Elles ont apporté leur nostalgie de la France, des chansons à transmettre à leurs enfants, et comme des 770 Filles arrivées  dans la décennie 1663-1673, sont nées 4445 enfants, vous comprenez que plus de 80% de la nation québécoise se sentent issus de ces mères. eurs descendantes présentes en ce 6 juin ,(dont beaucoup originaires de la Rochelle) nous ont régalés d’un tableau vivant, puis sur le mur du Pavillon Monthyon-Ste Claire une plaque a été dévoilée, qui rappelle ces liens entre Salpêtrière et Nouvelle France sous les yeux de personnalités québécoises et françaises dont notre maire Jérôme Coumet.

Journée passionnante, aux découvertes surprenantes, terminée autour d’un apéritif qui nous a permis de mieux nous connaître et nous a encouragées à aller visiter ou revisiter cette “Belle Province” d’Amérique

B.E & G.M

 

 

 

Une Réponse to “GAZETTE 89 – Les Filles du Roy”

  1. Einhorn Brigitte / Mennessons Georgette said

    Cette commémoration passionnante a été suivie d’une conférence de Marguerite David-Roy le jeudi 23 janvier, organisée par La Société d’Histoire et d’Archéologie du XIIIe arrondissement de Paris (SHA). Cette association tient sa permanence à la mairie du 13e, le jeudi de 10 h 30 à midi.Blog : http://www.sha13.canalblog.com

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